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Le dernier carré des Créneaux résiste encore

24-10-2011
Dernière mise à jour : ( 25-10-2011 )


Le bâtiment A est le dernier vestige d’une architecture qui ne s’embarrassait d’esthétique. PATRICK DI DOMENICO
Le bâtiment A est le dernier vestige d’une architecture qui ne s’embarrassait d’esthétique. PATRICK DI DOMENICO
La petite cité du 15e arrondissement doit être démolie dans le cadre du programme national de rénovation urbaine. Mais une poignée d’habitants refuse toujours le relogement.
Baroud d’honneur, bras de fer… Les expressions ne manquent pas pour qualifier la résistance des derniers habitants des Créneaux, petite cité bâtie à flanc de colline tout au fond du vallon des Aygalades. Il ne reste plus qu’un bâtiment sur les quatre. Le reste a disparu sous les dents de pelleteuses.
En lieu et place, il n’y a plus qu’un peu de sable jaune nivelé et des palissades qui entourent ce vide. Il ne reste plus que le A où trois familles résistent encore et refusent toute proposition de relogement. Au dernier, F.B. a des larmes plein les yeux. Elle vient d’enterrer sa mère, un an tout juste après son père. Elle lie ce décès aux errances du relogement. « Ma mère était fatiguée de tout ça. On lui a proposé une maison aux Castors de Servières mais ça ne convenait pas. Il y avait des escaliers, c’était mal rénové. »
Un point de vue battu en brèche par le logeur, la Logirem qui reprendra les négociations, une fois passée la période de deuil.
« Reste à charge »

Un peu plus bas dans les étages couverts de tags, Z. D. doit partir vivre aux Vergers, le petit ensemble neuf de l’autre côté de la rue Henri-Beyle. L’ancienne présidente de l’Amicale des locataires a déjà signé un accord de relogement. Mais depuis, elle a fait ses comptes et ne marche plus. « La Logirem s’est engagée à maintenir le prix du loyer. Mais j’ai 80 euros de charges en plus. Or, aux Vergers, il n’y a pas de hall, pas de couloir. A quoi vont servir ces charges ? »
Du côté de la Logirem, Françoise Mesliand précise : « Le maintien du loyer concerne ce qu’on appelle le "reste à charge". C’est-à-dire ce que le locataire paie une fois déduite l’aide au logement. Dans le cas de madame Djellouli, son "reste à charge" est divisé par deux pour un appartement certes plus petit mais neuf et qui répond aux critères de bas niveau de consommation énergétique. » A cet argumentaire, Z.  D. réplique : « J’ai trois enfants. Le jour où ils quittent la maison, j’aurais moins d’aides et moins de sous car je serai à la retraite. Comment je vais m’en sortir ? ». Déménager encore ? Elle ne veut pas.
Au-delà de ces questions financières, persiste l’impression d’avoir été exclu des décisions. « Pendant 40 ans, on a vécu là, à l’écart du monde, sans même un bus et tout le monde s’en moquait. Et d’un coup, il décide de démolir. Mais à quoi ça sert quand on voit qu’il y a tant de gens qui n’ont pas de logements décents. »
La situation devrait durer encore plusieurs mois avec l’hiver et la trêve des expulsions. Au printemps, le logeur n’exclut pas d’avoir recours aux forces de l’ordre pour précipiter les départs et faire enfin disparaître les Créneaux.     BENOIT GILLES

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